Affaires internationales : Libye, de l’audace à la lucidité, actualité de l’été 2011

Thierry de Montbrial et François d’Orcival, de l’Académie des sciences morales et politiques
François d’ORCIVAL
Avec François d’ORCIVAL
Membre de l'Académie des sciences morales et politiques

Dans cette émission mensuelle, Thierry de Montbrial et François d’Orcival, de l’Académie des Sciences morales et politiques, reviennent sur la campagne de Libye remportée par les troupes de la coalition internationale et la chute de Kadhafi. Chaque mois, ils analysent ainsi les principaux sujets de l’actualité mondiale.

_ L’actualité internationale l’imposait. Enregistrés le jour même où se tenait à l’Elysée la conférence internationale pour le soutien à la future Libye (jeudi 1er septembre 2011), les deux confrères de l’académie des sciences morales et politiques consacrent la totalité de leur entretien à l’analyse de la chute du régime Kadhafi.

Montbrial le souligne d’entrée : ce fut la victoire de l’audace et de la détermination. Le président de la République a vu clair le premier, a su convaincre (comment ? – nous le saurons plus tard) David Cameron mais aussi Barack Obama de s’engager dans cette campagne. Puis il a su être patient et persévérant jusqu’au succès.

Cette campagne mérite d’être comparée à deux autres : celle des Balkans en 1999, celle d’Irak, à partir du printemps 2003. En 1999, les bombardements aériens ont réussi à faire capituler Milosevic en trois mois (mars-juin), sous la direction des Etats-Unis ; en Irak, après une offensive rapide qui a fait tomber le régime, la campagne s’est enlisée dans une guerre civile sans fin.
Montbrial insiste sur les différences : en 1999, le Kosovo se trouvait à l’intérieur de la zone d’intervention de l’Otan, tandis que la Libye, cette année, ne l’était pas ; le terrain était donc parfaitement reconnu dans les Balkans alors qu’il ne l’était pas de la Cyrénaïque à la Tripolitaine. Même chose pour l’Irak, les services de renseignements savaient tout de ce théâtre depuis la guerre du Golfe de 1991, alors que l’on ignorait l’essentiel du théâtre libyen. Et pourtant, les données actuelles font apparaître le traitement de l’affaire libyenne comme un modèle d’intervention et la campagne irakienne comme un « contre modèle ».

La suite de la transition militaire et politique réclame maintenant de la lucidité. Il reste beaucoup d’interrogations à éclaircir – et notamment le rôle des milices islamistes et des filiales d’Al Qaïda dans l’insurrection libyenne. Que seront les revendications à venir de ces éléments ? On voit déjà les inquiétudes de l’Algérie et de la Tunisie.
Cela signifie, dit aussi Montbrial, que l’on ne peut échapper à la question israélo palestinienne et la nécessité de trouver une issue à ce dossier.
Il y a un signe qui ne trompe pas : la présence de plus en plus forte de la Chine dans cette région stratégique où les Chinois n’intervenaient pas jusqu’à présent. Or on voit que la Chine a décidé de jouer son rôle en Iran et en Syrie – cette Syrie où la répression est aussi sanglante qu’elle aurait pu l’être en Libye avec Kadhafi, mais où les Nations unies et l’Otan sont empêchés d’agir. Par qui ? Par la Russie et la Chine.

Pour en savoir plus :

À propos de Thierry de Montbrial :

Thierry de Montbrial dirige l'Institut français des relations internationales (Ifri) qu'il a fondé en 1979. Il est membre de l'Académie des sciences morales et politiques de l'Institut de France. Il est également fondateur et président de la World Policy Conference.

À propos de François d'Orcival :

Outre le journaliste bien connu de "Valeurs Actuelles" -dont il est président du comité éditorial - et du Figaro Magazine, ou même de LCI, François d’Orcival a été élu par ses pairs de tous les bords politiques, dès 1998, Président du Syndicat professionnel de la presse magazine et d’opinion (SPPMO). Il le reste depuis plus de dix ans !

- François d'Orcival de l'Académie des sciences morales et politiques

- Écoutez la chronique de François d'Orcival sur l'intervention de la coalition en Libye : Opération Harmattan Sarkozy. Une chronique de François d’Orcival

Le Roman de l'Elysée : De la Pompadour à Nicolas Sarkozy, 2007, François d'Orcival, ed. du Rocher, 451 pages.

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