Un cinéaste nommé Cousteau, un album sur le visionnaire de la mer (4/7)

présenté par Françoise Thibaut, correspondant de l’Institut
Avec Françoise THIBAUT
Correspondant

Le salon de la marine bat son plein : belle occasion de découvrir un livre merveilleux : Un cinéaste nommé Cousteau, de Franck Machu (ingénieur en génie maritime) aux Éditions du Rocher. Un pavé de 480 pages qui emporte dans une des plus belles aventures de la seconde moitié du 20ème siècle, au gré d’une vie et d’un destin exceptionnels.

Émission proposée par : Françoise THIBAUT
Référence : hist717
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Jacques-Yves Cousteau, élu à l'Académie française en 1989, occupe encore nos souvenirs, éveille toujours l’esprit de nos enfants : son nom prononcé évoque tout de suite sa longue silhouette, le bonnet rouge, sa voix si particulière, son sourire, la Calypso, les voyages maritimes toujours renouvelés, l’aventure sous-marine, la découverte de l’envers de l’eau, des fonds marins, le regard recréateur sur les fleuves, l’Antarctique, les iles oubliées ou inconnues.


Jacques-Yves Cousteau fut un visionnaire dans bien des domaines : marin, ingénieur, chercheur, plongeur, aventurier, entrepreneur, chef d’équipe et d’entreprise, scientifique et littéraire, impatient et opiniâtre, ne tenant pas en place mais avec des objectifs précis.
La question de l’auteur est : pourquoi est-il toujours si présent ? Et la réponse est : par ses films. Par son cinéma qui a montré au monde l’inimaginable, l’inconnu, rendu palpable le rêve du capitaine Nemo : vivre sous la mer, en être heureux.


Le livre retrace une aventure, une vie, mais aussi et surtout une suite d’innovations, de découvertes, d’audaces voyageuses et scientifiques ; et aussi cette inébranlable soif du partage : faire connaitre, faire découvrir, divulguer les secrets de l’eau.
La première partie du livre : « les instruments du rêve » (avant 1951) sont palpitants : ils retracent, avec toutes leurs tribulations, l’invention progressive, besogneuse et sportive de la plongée libre, sans tuyaux ni scaphandre : exercice périlleux où certains laissèrent la vie, bricolage incroyable où les premiers accessoires sont découpés dans de vieux pneus, les tubas fabriquées avec des tuyaux de plomberie. Le coup de génie a été de négocier très vite avec l’Air Liquide. La plongée sous marine qui nous semble si banale aujourd’hui, facile, évidente, est née en Méditerranée dans ces années 50-60 : découverte de Jojo le mérou, star des premiers documentaires, des bancs de girelles, de l’ivresse des profondeurs, de la photogénie des épaves. Car parallèlement, la saga des films sous marins commence ; Une visite décisive pour Jacques-Yves Cousteau en 1943 à Bandol avec Louis Lumière, les débuts des films avec Marcel Ichac, Jacques Ertaud, puis après 1953 avec Séchan, Goupil, et Louis Malle pour aboutir au « Monde du Silence » qui laisse éberlués des millions de spectateurs.

Cousteau crée le GERS : Groupe d’études et recherches sous-marines, rencontre Auguste Piccard et filme le bathyscaphe, accompagne cette aventure.


La deuxième partie retrace la difficile acquisition de la Calypso, financée par Lord Guiness, le non-amour de Georges Pompidou pour les entreprises cousteaudiennes. Cela sera compensé par une alliance avec le National Geographic : de 1966 à 1975 ce sera « the world of Jacques Cousteau » pour la chaine CBS dont l’apogée est le long métrage « Un monde sans soleil » : L’indispensable Albert Falco, chef des plongeurs-cameramen devient une star, on découvre les tortues, la barrière de corail, les calamars géants, la vie secrète des cachalots .
En 1973 Cousteau crée la Cousteau Society : il a besoin de mécènes pour financer une nouvelle ambition : la redécouverte de l’Antarctique : cela donnera une série de moyens métrages époustouflants, les premières images de l’envers des icebergs, des immenses colonies de manchots, des volcans du continent glaciaire, puis un long métrage « le voyage au bout du monde » qui débute par ces magnifiques images du survol du monde blanc par une montgolfière multicolore, sur fond de musique de Maurice Ravel …Inoubliable.


Jacques-Yves Cousteau (1910-1997)
© Cousteau Society

A partir de 1986 Cousteau, financé par Ted Turner entame « la re-découverte du monde » : plusieurs équipes explorent les grands fleuves, les îles perdues, certaines jamais vues. Cousteau quitte la direction du Musée océanographique de Monaco, qu’il occupe depuis 1959, est élu à l’Académie française, atteint son apogée médiatique avec des diffusions sur les chaînes de télévision du monde entier, la publication de livres illustrés à partir de ses photos et de ses films. Il crée une sorte de « banque d’archives » car la moisson montrée au public ne représente que quelques pour cent de l’ensemble filmé. On peut considérer que l’équipe Cousteau crée une sorte de « bilan géographique global de la planète » dans les années 90.


Jacques Yves Cousteau continue de faire rêver : il est le découvreur de l’Atlas des profondeurs. Le Traité de l’Antarctique de 1988 faisant du Continent blanc une « réserve naturelle » impropre à toute exploitation, à la guerre, au conflit quel qu’il soit, lui doit beaucoup. Finalement, il est sans doute le premier des écologistes modernes, et a ouvert la voie, non pas de manière négative, mais de façon enchantée : «l’océan est beau, préservons-le ; la nature est superbe, protégeons-la».

Selon Michel Serres « Cousteau a inventé une posture inédite : celle du premier homme à incarner la défense de l’environnement à l’échelle planétaire ». Et Bertrand Poirot-Delpech d’ajouter « la plongée produit une morale, une esthétique et même une idéologie : la mer, dessus comme dessous ne tolère aucune frime ».

On retrouve dans ce beau livre, extrêmement documenté, et fort bien écrit, souvent drôle, l’enthousiasme, l’énergie, une joie de vivre inoubliables qui animaient l’équipe Cousteau et qui restent inscrites dans les films. Leur catalogue minutieux est impressionnant et permet de les retrouver dans les banques Internet.
Pour traverser un joyeux hiver, nager, rêver, courir le monde, plonger, parler aux dauphins et aux baleines, rencontrer des merveilles, s’emplir de secrets, voilà un livre détonant, passionnant Un cinéaste nommé Cousteau de Franck Machu ; un livre beau simplement, si beau, comme l’Océan.


Un cinéaste nommé Cousteau aux Editions du Rocher, 488p..


Découvrez nos émissions sur le commandant Jacques-Yves Cousteau, de l'Académie française



En savoir plus:

- Consultez le site de la Fondation Cousteau




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