Mai 68 selon Alain Besançon

Membre de l’Académie des sciences morales et politiques
Avec Hélène Renard
journaliste

Alain Besançon, ayant terminé fin mai 68 son enseignement aux Etats-Unis, est ébahi et inquiet de retrouver Paris en ébullition et des revendications se réclamant du communisme ! Pour lui, les racines de cette agitation sont profondes et anciennes. La religion de l’égalitarisme n’est pas terminée !

Émission proposée par : Hélène Renard
Référence : foc350
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Alain Besançon était Professeur invité à la Rochester Université de New York. Tout juste avait-il lu, au début du mois de mai 68, dans un quart de colonne en page 14 (!) du New York Times que des agitations avaient lieu en France... Son cours étant achevé, il prit donc des billets d'avion pour revenir et nota d'emblée un premier changement : à l'aéroport, il rencontre Fernand Braudel, grand maître que nul n'abordait qu'avec un respect distancié (Alain Besançon avait alors 35 ans et Braudel plus du double). Et voici que, toute hiérarchie disparue, le grand maître s'approche de lui !
Drapeaux rouges, aéroports en grève, poubelles répandues dans les rues, tout cela parut au jeune professeur revenu de New York un délire. D'autant qu'il était spécialiste -il l'est toujours- de la Révolution russe, du marxisme, du langage du communisme et que cette pseudo-révolution parisienne au nom du marxisme avec les défilés de la CGT, lui parurent ahurissants.
Il explique dans cette émission qu'il existait en fait un pacte tacite entre Brejnev et De Gaulle.

Ce qui le frappait également : la démission des adultes. Aucune voix ne s'élevait (ou si peu) pour remettre les jeunes à leur place !

L'un des titres de l'Humanité l'avait particulièrement inquiété : « Vers un gouvernement populaire ». Il y avait à craindre que le Parti communiste ne prenne en quelque sorte le pouvoir. Heureusement, les élections écartèrent ce danger. Le soufflé est aussitôt retombé et la crise grave fut évitée.

Cependant, Alain Besançon analyse que la poussée de démocratisation et de libéralisation des mœurs ont touché toutes les couches de la société (l'hôpital, la famille, l'école, l'Eglise, le couple, etc.) et que bien des remises en question durent encore. Le mouvement n'est pas fini. Il est très profond.

Et en vérité, Mai 68 n'est pas né en France ! Il se souvient qu'en janvier 65, il avait assisté à un « sitting » d'étudiants contestataires (une vingtaine) à Berkeley. Et il avait compris que le mouvement allait se répandre. Dans les années 66 et 67, on vit d'ailleurs au Canada l'hypercléricalisme voler en éclats...

Si le XXe siècle a vu naître deux utopies révolutionnaires, le nazisme et le communisme, se poursuit aujourd'hui une religion de l'égalitarisme, de l'indifférencié qui sévit encore partout et qui a même traversé en son temps le rideau de fer...

Ecoutez d'autres témoignages d'académiciens sur Mai 68 :
- Mai 68 selon Jean Tulard
- Mai 68 au Collège de France

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