Montmartre, Francis Carco

Robert Werner lit les poètes
Robert WERNER
Avec Robert WERNER
Correspondant

Montmartre a connu d’autre jeux,
D’autres voix, d’autres rires jeunes.
Mais cela n’importe : le jaune
Matin brille dans les carreaux.

Hélas ! l’Amour nous trompe et pleure,
Nous l’accueillons et le fêtons.
Le matin bleuit tristement,
L’horloge ne marque pas l’heure.

Ceux qui nous ont quittés sont là :
L’un chante et l’autre est près du feu.
Ils boivent et se rient entre eux
Du jour et de son mauve éclat.

Voici Mimi, Blanche et Germaine ;
La plus sévère a les yeux faits.
Le jour envahit tout à fait
Les carreaux encrassés et blêmes.

Et toi, buttée contre mon cœur,
Pauvre petite abandonnée,
Tu te plains à la dérobée
De quel cruel et doux malheur ?

Tais-toi : mes souvenirs blessés
Dorlotent tes mauvais sourires.
Je t’adorais sans te le dire.
Tu pleuras quand j’en eus assez.

O Moreau, poète ! Hégésippe !
Parle lui, tu sais consoler.
Moi, dans le matin violet,
(Jaune, bleu, mauve, violet)
Je descends en fumant ma pipe

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