J’ai dit à mon cœur, Alfred de Musset

Lecture par Robert Werner
Robert WERNER
Avec Robert WERNER
Correspondant

J'ai dit à mon cœur, à mon faible cœur : 
N'est-ce point assez d'aimer sa maîtresse ? 
Et ne vois-tu pas que changer sans cesse, 
C'est perdre en désirs le temps du bonheur ? 
 
Il m'a répondu : Ce n'est point assez, 
Ce n'est point assez d'aimer sa maîtresse ; 
Et ne vois-tu pas que changer sans cesse 
Nous rend doux et chers les plaisirs passés ? 
 
J'ai dit à mon cœur, à mon faible cœur : 
N'est-ce point assez de tant de tristesse ? 
Et ne vois-tu pas que changer sans cesse, 
C'est à chaque pas trouver la douleur ? 
 
Il m'a répondu : Ce n'est point assez 
Ce n'est point assez de tant de tristesse ; 
Et ne vois-tu pas que changer sans cesse 
Nous rend doux et chers les chagrins passés ? 

 

Alfred de Musset, Premières poésies 

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